Avez-vous déjà remarqué que les moments qui marquent notre esprit le font souvent sans qu’on s’en rende vraiment compte ?
On les vit comme des événements ordinaires, voire complètement insignifiants, et, silencieusement, leur souvenir se forge un chemin jusqu’aux recoins de notre cerveau qui n’oublient jamais. Je me demande souvent pourquoi certains moments restent ancrés dans mon esprit avec la précision du « comme si c’était hier » alors que d’autres, que je trouvais pourtant plus importants au moment de les vivre, sont devenus des bribes incertaines et volatiles, des bribes qui finissent parfois par disparaitre à tout jamais sans crier gare.
Si je vous dis ceci, c’est parce que pour moi 2020 a bouleversé cette règle, comme elle en a bouleversé tant d’autres.
2020 a été une année spéciale, une année historique. Une de celles que d’innombrables personnes auraient préféré ne jamais devoir vivre, certes, mais une année historique quand même. Et une année que j’ai personnellement passée avec la sensation étrange de savoir pertinemment qu’elle allait se retrouver dans les livres d’histoire qui seront étudiés par nos enfants.
Avec la situation exceptionnelle qu’elle nous a fait vivre, 2020 a donné tout son sens à beaucoup de mots qui étaient jusque là des concepts bien trop abstraits pour moi. L’épidémie. La quarantaine, le confinement, le couvre-feu. La liberté de mouvements, son importance et sa fragilité.
En 2020, j’ai d’abord beaucoup pensé à ma mamy qui disait à quel point elle en voulait à la guerre de lui avoir volé ses années de jeunesse, et à moi qui acquiesçait sans arriver à réellement comprendre ce qu’elle ressentait. Bien que l’épidémie et les restrictions sanitaires sont loin de ressembler à la guerre, j’ai découvert dans cette situation un brin de cette sensation dont elle parlait. Celle de voir les jours passer, les uns après les autres, sans pouvoir en faire ce qu’on en voudrait. Cette sensation de voir le temps s’écouler entre nos doigts plus fortement que d’habitude, et avec lui les plans qu’on avait faits pour un avenir plus ou moins proche. Cette sensation de ne plus être réellement maître de sa vie, et de passer ses journées à attendre de pouvoir reprendre le contrôle sans réellement savoir quand ce jour arrivera.
2020, c’est aussi l’année où la majorité de la planète a vécu au même rythme. Celui des courbes du coronavirus sans cesse rapportées dans les journaux, celui du temps qui s’écoule calmement entre les murs que l’on connait si bien. Et parmi toutes les choses qui m’ont marquée en 2020, celle-ci est peut-être la plus importante : celle de voir à quel point, pendant quelques mois, l’Europe entière (et le monde bien plus au-delà de nos frontières) s’est mise à vivre un quotidien incroyablement semblable.
Jamais auparavant, dans mon entourage et sur les réseaux sociaux, je n’avais vu autant de gens rester chez eux au même moment et partager le rythme ordinaire (ou pas trop, justement) d’une journée à la maison. Tout à coup, les réseaux sociaux, qui nous rappellent souvent à quel point on a tous des vies bien différentes, sont devenus cette collection de profils qui résonnent et vivent au même rythme. Comme sûrement beaucoup de personnes, en 2020 j’ai passé des heures à rire devant des vidéos stupides sur fond de pandémie (coucou les bêtes blagues sur le papier toilette), j’ai fait d’innombrables screenshots de recettes (vous aussi vous vous demandez si vous arriverez un jour à voir une recette de pain ou de banana bread sans penser au confinement ?) et j’ai essayé plusieurs cours de sport gratuits en ligne. Autant de tendances qui sont apparues avec la pandémie, comme si tout à coup le monde essayait de s’amuser ensemble et de s’entraider par écrans interposés pour oublier le reste.
Et puis comment parler de 2020 sans mentionner toute la souffrance qu’elle a engendrée ?
Le coronavirus a fait de 2020 une année de pertes : que ça soit un être cher, un revenu, la santé ou juste la tête, beaucoup de personnes ont perdu plus qu’elles n’ont gagné. Dans les derniers mois de l’année, avec la venue des nouvelles restrictions, j’ai beaucoup pensé à ceux qui se trouvaient isolés, à ceux qui ne pouvaient plus payer leurs factures, à ceux pour qui 2020 a été un fardeau très lourd à porter et que 2021 n’a pas encore allégé. À tous ceux dont la vie a été piétinée et déchirée au nom de ce qui devait pourtant les maintenir sur pied, au nom de la santé.
Quand 2020 me serre le cœur ou le rend lourd, c’est pour eux.
Et comme si ce n’était pas suffisant, 2020 a mis d’autres horreurs sur la route de beaucoup de gens, à commencer par les feux qui ont décimé une partie de l’Australie en début d’année ou l’explosion qui a ravagé Beirut en été.
Mais je parle de cette souffrance, et pourtant je fais partie des chanceux qui ne l’ont vécue que de loin. De ceux qui compatissent mais qui ne peuvent pas comprendre. De ceux qui ont survécu à une année qui n’a pas réussi à les mettre à genoux.
2020, c’était comme un mauvais café que le monde a voulu nous donner pour nous réveiller. Moi je suis de ceux qui ont eu l’incroyable chance d’avoir eu suffisamment de sucre pour en cacher l’amertume.
Ce que je veux dire, c’est que 2020 avait des épreuves pour tout le monde, mais elle en a foiré la répartition. Moi, 2020 elle m’a donné des épreuves de riches et de chanceux. Des épreuves qui n’ont rien à voir avec ce contre quoi d’innombrables personnes ont dû se battre, des épreuves qui n’avaient même pas réellement le goût d’épreuves.
Dans ce monde en flammes digne d’un film de science-fiction tels que ceux que j’évite toujours de regarder, ma petite épreuve à moi, c’était celle du stress. Celle de savoir que le virus pouvait finir par atteindre l’un de mes proches. Et celle d’avoir dû mettre en pause mes projets de voyage alors que mon envie de découvrir le monde est souvent celle qui me rappelle à quel point le temps court trop vite et finit toujours par nous échapper. 2020 a peut-être dû se dire que pour la grande stressée que je suis, tout ça allait suffire. Mais, pour une raison que j’arrive encore très peu à expliquer, ce sont des épreuves que j’ai relevées sans trop de peine.
Je n’ai pas stressé quand le coronavirus envahissait déjà les journaux alors qu’il n’était qu’en Chine. Je n’ai pas non plus stressé quand il est arrivé en Europe ni quand, en voyant la réalité dans les hôpitaux italiens, j’ai compris l’ampleur de la situation. Je n’ai que peu stressé, enfin, quand le confinement a commencé, ni quand ma famille a, comme moi, dû vivre dans un monde dans lequel le virus rôdait. Et la seule chose qui m’a fait stresser, à vrai dire, c’est quand mes plans de vacances d’été ont été frappés par l’incertitude et puis qu’ils ont commencé à être franchement bancals.
J’ai juste stressé pour mes vacances.
Oui moi aussi je trouve ça bizarre, mais c’est comme ça.
Et puis quand mes plans ont été annulés les uns après les autres, j’ai arrêté de stresser. J’ai replanifié d’autres vacances et, une fois le confinement terminé, j’ai arrêté de lire les journaux. En deux mois de confinement, j’ai compris que de toute façon ils n’avaient rien de bon : les experts n’étaient pas d’accord, les gouvernements changeaient sans cesse d’opinion et les journalistes s’amusaient juste à trouver les titres les plus racoleurs, c’est tout.
C’est arrêter de lire la dose quotidienne de nouvelles du monde, toutes teintées du fameux Covid comme s’il n’existait que lui, qui m’a naturellement amenée à laisser le stress de côté. Il n’avait pas entièrement disparu, mais il avait plutôt la forme d’un gros paresseux qui avait envie de dormir, et comme je ne l’alimentais pas avec des histoires croustillantes, il préférait somnoler.
J’ai tellement peu stressé qu’au début du premier confinement je prenais ça presque comme un jeu. Je n’ai pas perdu mon boulot, par contre j’ai gagné un collègue dans mes bureaux : moi qui travaille de toute façon de la maison en temps normal, j’ai eu le plaisir de partager mes locaux avec mon copain et ne l’avoir que pour moi pendant trois mois. C’est vrai que j’étais bloquée dans un 45m² sans jardin ou balcon alors que les beaux jours me narguaient de l’autre côté de la fenêtre, mais j’étais bloquée dans un 45m² à deux. Ni seule, ni mal accompagnée.
Et donc, juste comme ça, j’ai été épargnée par la crise du coronavirus. Non seulement ça, mais j’ai aussi eu la chance de pouvoir remplir 2020 de choses positives.
2020, d’abord, c’est l’année où j’ai entendu les oiseaux chanter à Paris. 2020, c’était aussi l’occasion parfaite de redécouvrir Paris sans sa foule de touristes. Me balader dans les rues tranquilles de la capitale en été et visiter dans le calme des lieux d’habitude si fréquentés, comme l’opéra Garnier et le château de Versailles, était l’une des plus belles récompenses post-confinement.
Je parle de Paris parce que j’y suis beaucoup restée en 2020, mais j’ai aussi réussi à voyager un peu ici et là. En 2020, j’ai passé quelques jours à Budapest et en Hongrie en février, deux semaines entre le sud de la France et la Vendée (avec un passage très rapide par Nantes) en juillet, une journée à Orléans en août, et quelques heures à Malines, Anvers et Bruges en Belgique en décembre.
Mais ce n’est pas tout : en 2020, j’ai passé deux semaines d’été en Grèce, entre Athènes et les îles de Paros et Folegandros dans les Cyclades. Non seulement c’est un voyage que je rêvais de faire depuis plusieurs années et dont la perfection a dépassé mes attentes, mais c’est aussi un voyage qui m’a offert une jolie surprise : j’y suis partie avec mon copain et j’en suis revenue avec un fiancé.
Il m’a demandée en mariage au lever du soleil sur la petite île de Folegandros à la beauté encore intouchée…
Les Cyclades peuplaient mes rêves d’été depuis des années et elles ont été encore plus belles que tout ce à quoi je m’attendais. Je n’ai aucun doute que leur éventail de blanc, bleu et rose restera gravé parmi mes meilleurs souvenirs de vacances. Quant à Athènes, elle a aussi été un vrai coup de cœur, bien que tout à fait différente des Cyclades. J’espère vite trouver le temps de vous en parler plus en détails.
Enfin, pour finir 2020 en douceur après toutes ces aventures, j’ai terminé l’année par deux mois chez mes parents en Belgique, où je me suis réfugiée avec mon tout nouveau fiancé lorsque le deuxième confinement a commencé en France. On est partis comme des voleurs, on s’est retrouvés à acheter un billet de TGV juste 30 minutes après l’annonce du deuxième confinement pour un départ le jour d’après, quelques heures avant que le confinement prenne effet. Je n’avais pas envie de quitter Paris mais l’idée de devoir refaire des attestations pour sortir dans un rayon de 1km de chez moi m’a, je dois dire, bien refroidie. Et au final, je suis très heureuse d’avoir pris cette décision. J’ai adoré passer ces deux mois près de ma famille en Belgique.
Non, vraiment, 2020 a été belle et douce pour moi.
La seule chose que j’ai réellement perdue en 2020, c’est le rythme. Le rythme de la vie normale, le rythme des séances de sport, le rythme des voyages mais aussi le rythme sur le blog. Autant de choses que j’espère retrouver en 2021.
Outre la recherche du rythme perdu, 2021 sera aussi placée sous le signe du mariage, ou plutôt de son organisation. J’ai d’ailleurs commencé l’année sur les chapeaux de roue, avec un premier essayage de robes de mariée pas plus tard que le 2 janvier !
La célébration de notre mariage devra attendre 2022, avec un mariage au Brésil début janvier et un deuxième en Belgique en été (la date de celui-là est encore à confirmer). Mais en 2021, on va déjà se marier civilement, quelque chose sans chichi, mais avec quelques-uns de nos proches quand même, juste pour les papiers.
En 2021, j’espère aussi revoir mes amis. Parce qu’entre les confinements, les interdictions de déplacement et la fermeture des bars et restaurants, 2020 nous a donné peu d’occasions de voir du monde. Sans compter les vacances des uns et des autres dès que c’était possible et les agendas déjà chargés pour tous les week-ends de liberté (vous aussi vos potes leurs week-ends ressemblent à des agendas de ministre ? ou bien c’est vous qui êtes comme ça ?). Je ne suis pas de ceux qui doivent voir leurs amis régulièrement pour se sentir bien mais là, ça commence à faire long.
Ce sont à peu près les seuls projets que j’ai pour l’instant. Je rêve toujours de voyages, de destinations françaises (parce que, irrémédiablement, plus le temps passe, plus l’on se rapproche du jour où l’on quittera la France pour s’installer plus au sud), mais aussi de destinations européennes et plus lointaines. Mais pour le moment je n’ose en rêver qu’à demi-mot, et l’agenda de mes mois à venir est rempli de « si » et de « peut-être ».
D’ici quelques semaines, je devrais avoir certaines réponses qui transformeront quelques « peut-être » en de réels projets et me permettront de débloquer d’autres « si ». Et j’attends tout ça avec impatience. Parce que si 2020 nous a montré plus que jamais à quel point tout projet peut être stoppé net à tout moment, je ne veux pas laisser le risque et l’incertitude mettre ma vie en pause pendant trop longtemps.
Je vous souhaite à tous une année 2021 remplie de projets, d’espoir et de bonheurs simples.
Pour relire mes bilans annuels précédents, ça se passe par là :
2020, et toujours la tour Eiffel en arrière-plan
2019 en français
2018, on reste ou on part ?
2017, j’attends tes réponses
2016, j’ai pas peur
Je ne trouve pas bizarre de stresser pour les vacances. Peut-être que ton stress cherchait juste une manière de se manifester, la bonne occasion. Et puis lu un petit article dans le National Geographic de février ; l’auteur expliquait que l’humain, en gros, est une espèce nomade, que l’on a toujours voyagé, et que donc ne pas pouvoir le faire bride une corde sensible. Les vacances/voyages c’est la liberté, la découverte. Et puis quand on vit un confinement, une privation de liberté, l’esprit peut se rabattre en disant “m’en fout, pars bientôt en vacances”, et quand les vacances sont en danger, il se réveille ! 🙂
Félicitations pour tes fiançailles !! Hyper romantique, en plus ! 😀
Tu as raison, c’est certainement ce qui m’est arrivé ! Vivement que l’on puisse de nouveau prévoir des voyages sans se dire que ça sera peut-être annulé à cause des restrictions qui changent si souvent ! Et merci beaucouuuup 🙂 !